vendredi 26 avril 2013

Le bodyboard pour les nuls



En ce dimanche 21/04/2013, j'ai vu la mort en face. Enfin, peut-être pas tout à fait en face mais tout du moins un bon profil, tirant sensiblement sur le trois-quarts.
Je faisais tranquillement du bodyboard à Puerto Escondido, le spot de surf numéro 1 au Mexique.
Bon, faire du bodyboard est peut-être un terme un peu présomptueux : pour être précis je galérais comme un rat mort dans une machine à laver géante avec des courants pas possibles et des vagues plus grosses que Michel Platini qui faisaient de moi leur petite chose.
Heureusement que j'avais ma planche et mon leash (le cordon de caoutchouc élastique qui est censé retenir le bodyboard attaché à votre poignet, empêchant ainsi la planche de partir au loin en vous laissant tout seul avec vos palmes et vos larmes. Vous voyez déjà où je veux en venir ?).
Les grandes marées des semaines précédentes avaient ramené dans l'eau tout un tas de cochonneries et la mer était parsemée de gros nuages d'écume froufroutants teintés d'un zest d'hydrocarbures.
Nous n'étions en tout et pour tout que 3 gugusses à la flotte, tous en bodyboard, sauf que sur les 3 il y avait 2 papas de la planche et un Pascal Duquenne de la glisse aquatique (je vous laisse deviner à laquelle de ces 2 catégories j’appartenais).
Au bout d'une heure, mon bilan était somme toute assez maigre : trois tentatives de vagues avortées, dont une avortée trop tard (l'équivalent bodyboardesque d'un 8ème mois de grossesse) ayant eu pour conséquence un bon gros wipeout fort logiquement suivi d'une pinte d’eau de mer cul-sec.
Pour ne rien arranger, l'eau de la côte Pacifique, habituellement chaude comme une baraque à frites, était ce jour-là bien frisquette.
Bref, lassé par ces échecs à répétition, votre serviteur décide de sortir de l’eau, un brin désabusé. Justement, une belle vague se profilait à l’horizon : l’occasion rêvée de regagner le bord rapidement.
Allez Pascal, c’est pas le moment de se trouer, là : rame, accélère, dompte la vague, fais d’elle ta petite bitch, montre-lui que est le… le…
Pa… Pascal ? Ça va ? Ça doit picoter un gadin comme ça… Mais qu’est-ce que tu fais sous l’eau ? Tu as vu une étoile de mer ? Tu en mets du temps pour remonter à la surface…
Mes poumons brûlent quand enfin je sors la tête de l’eau. Pas le temps de se reposer : à une trentaine de mètres, un tsunami m’arrive droit dessus. C’est le moment de prendre une très grande inspiration… Je plonge sous le monstre… Grosses turbulences… Ça remue, ça tourbillonne dans tous les sens. La force de l’eau tire sur la planche qui à son tour me tire sur le bras. Heureusement que je suis toujours attach… clonk. Mais qu’est ce que c’est que ce clonk ?
Malheureusement c’est bien ce que je pensais : mon leash made in China vient de me lâcher et ma planche s’est fait la malle.
Bref, me voilà au milieu de la machine à laver sans mon fidèle destrier, à 100 mètres du bord, pris dans des courants cauchemardesques. Une autre vague, encore plus épouvantable que les autres, m’arrive dessus. Je commence à être à bout de souffle. Je plonge quand même, le plus profond possible pour éviter le bouillonnement… Mais je tente de remonter trop vite : grave erreur… Impossible de remonter : je suis pris dans les remous et je commence à réaliser qu’il est possible que j’y reste. Au lieu de remonter, je fais des saltos… Où est le haut, où est le bas, il est où le cucul, elle est où la têtête ? FFFUUUUU…..
C’est à ce moment-là que je vois la mort. Non, sans déconner. Elle est moche la ribaude : je ne vous souhaite pas de la rencontrer…
Chienne de vie… Je sens que mes poumons vont imploser. Dans un dernier sursaut, je m’arrache et je regagne la surface. J’inspire un grand coup. Mais pas le temps d’enfiler des perles… Les murs d’eau continuent de se former et il faut prendre une décision rapide : nager vers le bord, où les courants sont les plus forts et les vagues les plus grosses, ou au contraire se diriger vers le large ? A l’instinct, je choisis la deuxième option. Il y a un autre bodyboarder un peu plus loin.
Comme j’ai les coucougnettes transformées en raisins secs, je ravale ma fierté et lui fais signe pour lui indiquer que je suis un peu en détresse. Ce bon bougre m’accorde l’asile politique sur sa planche.
Bon, ça y est je suis à l’abri. On fait des signes de bras pour alerter les guides baigneurs qui forcément regardent ailleurs. Pendant ce temps, mes fidèles compagnons qui étaient courageusement restés sur le bord à siroter des margaritas alertent les sauveteurs qui m’envoient leur meilleur élément en jet-ski. En quelques secondes, ce dernier ma rapatrie en terre-promise.
Voilà, une grosse frayeur donc, mais tout de même pas de quoi se coller un poireau dans le claque-bourbe.
En vous remerciant.